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COMTESSE DU MURAT

L’Hyver de 1709 (chanson)

Le tendre Amour soupirant
Hier disoit à sa mère :
Je ne sais quel accident
A fait geler ma terre ;
Mais il fait bien mauvais temps
Dans l’île de Cythère !

Les amoureux sont transis,
Auprès de leur bergère ;
Dans ses doigts on voit Tircis
Souffler et ne rien faire.
Ah ! que de cœurs engourdis
Dans l’île de Cythère !

Il nous faudroit des amants
Discrets, mais téméraires,
Qui ne fussent pas tremblants,
Mais ardents et sincères ;
Tels ne sont pas ceux du temps
Qui règne dans Cythère !

Après le froid c’est la faim
Qui nous livre la guerre ;
On appauvrit le terrain
D’Amour et de sa mère ;
On n’a plus que mauvais grain
Au marché de Cythère !

Jadis on alloit semant
Le grain en bonne terre,
On faisoit facilement
Une récolte entière ;
Que de déchets à présent,
Dans l’île de Cythère !