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Ménage (p. 520) et par Th. Corneille (I, 353), qui l’appelle un provincialisme. On trouve encore quelquefois il à la place de ce dans des phrases comme celle-ci : Il n’est donc pas de merveille, Monsieur, qu’un prince… ne s’en souvienne pas. (Balz., Diss. crit.,, III.)

§ 3. Dans l’ancienne langue, le pronom ils remplaçait souvent le pronom on de la langue actuelle. Comme en latin, on désigna d’abord un sujet indéterminé par le verbe à la 3e pers. et on y ajouta plus tard le pronom ils. Cet emploi du verbe avec ou sans pronom, assez fréquent chez les écrivains du xvie siècle, apparaît quelquefois au xviie et aujourd’hui même, il est familier à la langue populaire. [Ex. : J’allons dev’ni à rien, qui (= qu’ils) pourriont voir l’heure au cadran d’l’église au travers ed’mon corps. H. Monn., II, 314.]

Vaugelas mêle on et ils sans aucun scrupule et emploie souvent l’expression qu’ils appellent après un substantif, avec le sens de « ainsi appelé » ; c’est là un latinisme qu’on ne rencontre pas ailleurs.

Ex. : Qui est celui… qui s’il a fait quelque injure, ne la fit volontiers passer pour obligation ? Ainsi quand ils ont foulé quelqu’un aux pieds, ils prennent plaisir qu’il les remercie ; et ne pouvant être ni bons ni libéraux, montrent toutefois qu’ils seroient bien aises qu’on les eût en cette opinion. (Malh., II, 107.) — Ce terme est fort usité, particulièrement le long de la rivière de Loire, et même à la cour, où une personne de très-éminente condition a bien aidé a le mettre en vogue… Premièrement, ils en usent pour dire afin que… (Vaugel., Rem., I, 72.) — Quand on cite un livre ou un chapitre, ou que l’on nomme un pape ou un roi, ou quelqu’autre chose semblable, il faut se servir du nombre adjectif ou ordinant, et non pas du substantif ou primitif, qu’ils appellent, comme on fait d’ordinaire dans les chaires et dans le barreau. Ils disent par exemple « au chapitre neuf », etc. (Id., Rem., I, 215.) — En effet, les poëtes grecs et latins en ont fait de belles figures, dont ils ornent leurs écrits, comme est la synecdoche (qu’ils appellent) et plusieurs autres semblables. (Id., Rem., II, 81.) — De nos crimes communs je veux qu’on soit instruit : On saura les chemins par où je l’ai conduit. Pour rendre sa puissance et la vôtre odieuses, j’avoûrai les rumeurs les plus injurieuses ; Je confesserai tout, exils, assassinats, Poison même… Madame, ils ne vous croiront pas. Ils sauront récuser l’injuste stratagème D’un témoin irrité qui s’accuse lui-même. (Rac., Brit., III, 3,854 et 855.)