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bons auteurs écrivent seulement les pieds nus, Vaugelas (I, 144), ainsi que les autres grammairiens, conserve nu-pieds, Richelet de même, bien qu’il écrive aussi nuds-pieds. Vaugelas (II, 394) veut qu’on dise : feu ma mère, et blâme l’emploi assez courant : feue ma mère. Cf. Je vous avertis que c’est feue ma bonne amie, Madame de M. (Balz., Lettr., XI, 13.) — La mort de feue Madame la Maréchale d’Albret. (Maint., Corr., I, 354.)

§ 57. Article indéfini. L’emploi de l’article, facultatif encore au xvie siècle, ne devint obligatoire qu’au xviie, bien qu’on l’omît encore souvent en comparaison de l’emploi moderne.

I. On rencontre cette omission avec des noms concrets désignant un objet de l’espèce ; courante dans l’ancienne langue, elle ne l’est plus guère au xviie siècle. On la trouve encore lorsque le substantif est suivi d’une proposition relative, ce qui nécessite aujourd’hui l’emploi de l’article. (Voy. D, Fén., Tél., IX [X], ibid., XV [XX]) et avec un substantif servant à désigner une espèce, très souvent chez Scarron et chez La Fontaine. Ex. : Jeune fillette a toujours soin de plaire. (Contes, II, 15, 119.) — On sait que d’ordinaire À ces enfans Mère ne sait que faire. (Ibid., III, 5, 114.) — Fille se coiffe volontiers. (Fabl., IV, 1, 39.)

Cet emploi survit dans la langue actuelle après jamais[1].

L’article est plus souvent omis avec des noms abstraits qui, évoquant une idée générale, s’en passent plus facilement. Cette omission se rencontre :

A. devant un sujet logique ;

Ex. : Il y a souvent grande différence entre un docteur et un animal raisonnable. (Balz., Diss. crit., II.) — Il faut ordre nouveau. (Corn., Nic., IV, 5, 1430.) — Il faut retraite après où me sauver. (Id., Veuve, II, 6, 762.) — Il y a grande disette d’eau par toute cette contrée. (Vaugel., Q.-C., IV, 7.) — Il faut changement qui fasse que la forme de l’une devienne la forme de l’autre. (Pasc, Pens., II, l’29.) — Si dans la même Église il arrivoit miracle du côté des errans, on seroit induit à erreur. (Id., Pens., II, 83.)

B. devant l’attribut de c’est ;

  1. Jamais homme ne reçut plus d’hommages.