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effet que Dieu est actif dans la raison humaine, et qu’il répond aussi aux prières des hommes par des manifestations particulières. Comme le Toralba de Bodin, il croit aux miracles. Peu après la publication de son livre il fut relevé de ses fonctions d’ambassadeur, parce que la promptitude de sa méthode ne convenait pas à la politique hésitante de Jacques Ie. Il passa le reste de sa vie, occupé par ses études historiques et philosophiques, soit à Londres, soit dans son château du pays de Galles. Pendant la guerre civile, il se montra indécis, puis finit par s’attacher au Parlement. Il aurait préféré unir comme auparavant l’activité publique à ses études et il ne se consola jamais de ses déceptions politiques. Il mourut en 1648.

Herbert prépare sa doctrine de la religion naturelle au moyen d’une théorie de la connaissance qui n’est pas sans intérêt historique. — Pour pouvoir saisir la vérité, il faut en avoir en nous la faculté. Outre la raison critique et le sens interne et externe, il y a un instinct naturel qui pousse à développer certaines vérités communes à tous les hommes (notitiae communes). Nous avons déjà trouvé cette théorie stoïcienne chez Melanchthon et dans l’École de Melanchthon. Chez Herbert, elle sert de base aux vérités universelles que la comparaison des diverses religions menait à admettre. Cependant particulière à lui est la façon dont il allie l’origine de ces idées communes avec les instincts de conservation de l’individu et de l’espèce. L’instinct naturel dont elles dérivent est en effet la force mère de tout homme et de l’univers, l’instinct de conservation personnelle au sens le plus large du mot, par lequel la divine Providence se manifeste. Tout dans le monde tend sans raison consciente vers ce qui lui est le plus profitable. Comme les « idées générales » servent à conserver la vie et à maintenir la paix, ainsi l’instinct de conservation pousse à les développer et à les reconnaître. Les vérités les plus importantes pour l’individu et pour la société deviennent ainsi objet de reconnaissance instinctive. Une fois purgées de leurs additions impures et méthodiquement classées, elles forment un abrégé de science divine. De ces vérités sont les suivantes : des affirmations contradictoires ne peuvent être toutes vraies, il y a une cause première de toutes choses ; la nature ne fait rien en vain ; ne fais