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31. P. 143. En ce qui concerne la question des rapports du spirituel et du matériel, Bruno émet dans ses différents écrits des opinions un peu différentes. — Dans la Cena p. 189 il ne veut pas examiner si la substance spirituelle se change en substance matérielle ou inversement, ou si elle ne le fait pas. Dans le De la causa, p. 235 et suiv. (Cf. Spaccio p. 409). il prétend que la substance spirituelle existe au même titre que la substance matérielle, malgré toutes les modifications. En même temps dans le De la causa, p. 261 et 280 et suiv. il soutient l’unité absolue de la substance : la différence entre la substance spirituelle et la substance matérielle n’est due qu’à une différentiation (explication). Enfin dans le De gl’heroici furori, p. 721 il nie formellement la transformation du matériel en spirituel et inversement. — Ainsi qu’il le développe dans une série d’intéressantes propositions du De immenso I. 11-12, dans le principe suprême doit disparaître non seulement l’antithèse de l’esprit et de la matière, mais encore l’antithèse de la liberté et de la nécessité.

32. P. 147. La théorie atomistique ou théorie des monades de Bruno se trouve dans le poème didactique De triplici minimo, qui parut en 1591 à Francfort. Ainsi que Lasswitz l’a montré (Geschichte der Atomistik, Hamburg und Leipzig 1889, I, p. 359-399), elle occupe une place intéressante dans l’histoire de l’évolution de l’atomisme moderne. Il me semble toutefois que Lasswitz n’a pas remarqué la contradiction qui se trouve dans la polémique de Bruno contre la division à l’infini et dans sa théorie de la relativité de la notion d’atome. — Félice Tocco, qui a commencé par admettre (dans les Opere latine di G. Bruno), que Bruno avait aussi appliqué l’atomisme au domaine psychique, a par la suite rectifié cette opinion (dans son ouvrage : Opere inedite di G. Bruno, Napoli 1891). Il trouve maintenant une inconséquence chez Bruno de ne pas admettre des atomes psychiques aussi bien que des atomes matériels. Mais c’est la grande question de savoir si la notion d’atome peut en somme s’appliquer au côté spirituel de l’existence, et peut-être était-ce un juste instinct qui empêcha Bruno de faire cette application ; il est vrai que s’il était resté fidèle à la relativité de la notion d’atome, cette application n’aurait pas compris toutes les conséquences qu’elle pourrait sembler renfermer au premier abord. — Lorsque Tocco (Opere latine di G. Bruno, p. 353) remarque, au sujet de l’expression « monas monadum » (en parlant de Dieu), qu’on ne voit pas s’il distingue par là Dieu des autres monades, ou s’il faut le considérer comme leur substance, Bruno a déclaré clairement son opinion en disant : « Dieu est la monade des monades, c’est-à-dire l’entité de tous les êtres (Deus est monadum monas, nempe entium entitas. De minimo ed., 1591, p. 17). — Il appelle l’univers monade, De gl’ heroici furori, p. 724. On ne comprend ce sens du mot monade qu’en s’en tenant à la relativité du concept.

33. P. 148. Bruno dit de la métempsychose (Spaccio, p. 410), que si l’on ne peut y croire, elle ne laisse pas de mériter réflexion. Dans l’interrogatoire de Venise (voir Berti : G. Bruno., 2e édit., p. 402-408), il s’exprime encore avec une certaine indécision à ce sujet. — C’est dans la Cabala, p. 585-588, qu’il s’étend le plus longuement sur les rapports de l’esprit universel avec les âmes individuelles.

34. P. 160. Dans l’Apologia pro Galilæo, Francofurti, 1622, p. 54, Campanella dit que des recherches modernes l’obligeraient peut-être à croire à l’existence de plusieurs soleils dans l’univers, en sorte que celui-ci n’aurait plus deux centres, comme on supposait jusqu’alors, à savoir le soleil et la terre, mais un grand nombre. Cependant il s’abstient de se prononcer. — Même doute dans la Realis philosophia (1623), p. 10. — Par la suite il intercala dans son Universalis philosophia seu metaphysica