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bien être sorti de l’École cartésienne primitive — si celle-ci avait pu faire abstraction de la substance pensante, qui de temps en temps touche la glande pinéale. La Mettrie, empruntant la méthode comparée, cherche à montrer qu’entre l’animal et l’homme il n’y a qu’une différence de quantité, et que par conséquent il n’y a pas lieu d’admettre que chez l’homme il vient s’ajouter une espèce de substance toute nouvelle. Pour ne pas se méprendre sur La Mettrie, il faut tenir compte qu’il n’a pas écrit que l’ouvrage L’homme machine, mais encore un autre ouvrage intitulé Les animaux plus que machines. Après avoir dégagé l’affinité de la structure et du fonctionnement de l’organisme chez l’homme et chez l’animal, il se propose de fournir la preuve que ce qui agit dans l’un comme dans l’autre ne diffère pas en substance. Il va même plus loin. Il relève non seulement les ressemblances entre l’homme et l’animal, mais encore les ressemblances entre l’homme et la plante (L’homme plante). Et de toute la progression que nous montre l’étude de la structure et des fonctions des êtres vivants, il conclut que, si la vie psychique se trouve en haut, elle ne peut pas absolument disparaître en bas. Il étend la faculté de sentir à tout ce qui est vivant, voire même à tout ce qui est matériel ; tout dans l’univers est plein d’âmes, et ici il renvoie (Les animaux plus que machines, œuvres philos., Berlin, 1755, II, p. 82) aux monades endormies de Leibniz. — Or cette échelle ne consiste pas chez La Mettrie en formes finies une fois pour toutes. Il croit, s’associant soit au naturaliste Maillet, raillé par Voltaire, soit à Epicure et à Lucrèce — à un développement des formes inférieures dans les formes supérieures. Il semble (Système d’Epicure, §§ 13, 32-33, 39) qu’il ait cru à des germes organiques éternels dont sont sorties avec une perfection progressive les différentes formes vitales par suite de leur action réciproque avec le milieu. La force d’impulsion, ce sont la tendance, les besoins. Une vie psychique supérieure ne naît qu’avec l’apparition d’autres besoins que les besoins purement végétatifs. Les plantes n’ont pas besoin d’âme proprement dite. Les formes transitoires entre les plantes et les animaux possèdent d’autant plus d’intelligence qu’elles sont plus contraintes de se mouvoir pour trouver leur nourriture. L’homme occupe le point le plus élevé