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Mais la légitimité du rapport de causalité n’est-elle pas fondée par l’expérience ? — À ceci il faut répondre que l’expérience nous montre seulement qu’un fait en suit un autre, sans nous expliquer la nécessité intérieure de leur liaison, que l’on entend par ce mot : rapport de causalité. Cela est vrai, que par expérience nous entendions l’expérience externe ou l’expérience interne. Hume réfute spécialement l’opinion (professée par Berkeley) que nous avons dans la conscience immédiate de notre volonté une perception de la force ou de l’activité. Une seule expérience ne peut nous donner l’idée de causalité, et plusieurs expériences ne font que nous donner un rapport de succession. Lorsque nous avons vu très souvent un phénomène succéder à un autre, nous attendons involontairement le premier, lorsque le dernier se reproduit ; mais c’est là une habitude, et cela ne prouve pas que nous ayions le droit de conclure du passé à l’avenir.

Dans l’explication qu’il donne du penchant que nous avons à dépasser une sensation donnée et à croire à une chose non donnée ou à s’y attendre, Hume part d’abord de cette expérience, que tout état fortement excité ou toute disposition fortement excitée (disposition, feeling) où est jetée la conscience, a tendance à durer et à s’étendre au delà des idées nouvelles qui surgissent. Si la conscience a été accrue ou excitée par un objet quelconque, chaque acte de conscience se produira plus vivement que d’ordinaire, tant que dure l’excitation. Cette même loi expliquait déjà l’idéalisation des idées mathématiques. — Deuxièmement, il insiste sur ce fait, que l’expérience nous montre le penchant qu’ont nos idées à se provoquer mutuellement. Toute idée a une tendance associative : une douce force (a gentle force) mène de l’une à l’autre. Hume cite comme conditions de cette association l’analogie, la coexistence dans l’espace et dans le temps, la causalité. Ici se manifeste dans le monde intérieur une attraction aussi significative pour lui que l’attraction physique pour le monde extérieur. Mais son essence n’en est pas moins mystérieuse. : les causes doivent en être dans des propriétés pour nous inconnues de la nature humaine. Le lien qui unit nos idées est aussi incompréhensible que celui qui unit les objets extérieurs ; et l’expérience seule nous le fait