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appelant l’attention sur l’importance des éléments infiniment petits. Il a ouvert à l’observation de soi un monde nouveau où elle reconnaît il est vrai qu’il lui manque un outil correspondant au microscope dans le domaine de l’observation extérieure. Il a indiqué des points de vue qui permirent d’affirmer la continuité du côté spirituel de l’existence dans une bien plus grande mesure que la conception ordinaire ne le souffrait, à vrai dire plus aussi que Leibniz ne le croyait lui-même, puisqu’il laissait les monades sans fenêtres et les retranchait ainsi des influences inconscientes du reste de l’existence. Les éléments de l’existence (les monades) ne se distinguent les uns des autres que par le degré de clarté ou d’obscurité de leurs états internes ; de même les états d’un seul et même individu ne se distinguent que par des différences semblables de degrés. Ici nous remarquons que nous entrons dans le siècle de la philosophie. On croit toutes les conditions réunies : — Il ne reste plus qu’à approcher la lumière : c’est sur cette croyance optimiste que Leibniz et ses successeurs édifièrent leur système. Toutefois au point de vue purement psychologique, il faut remarquer que Leibniz indique une observation de la vie psychique plus profonde que celle dont partent le rationalisme et l’époque des « lumières ». Premièrement, le monde a pour Leibniz un contenu infini donné sous une forme obscure, dont l’intelligence complète est par suite impossible à un être fini. De plus, outre les sensations et les représentations, il pose comme élément autonome l’appétit et la tendance à passer à de nouvelles sensations. Aspirer ou vouloir, voilà pour lui le fond le plus intime de l’homme, et c’est une aspiration qui ne saurait cesser. Sa position vis-à-vis des passions est assez hésitante. Tantôt il les considère comme des pensées confuses ; et par conséquent elles doivent disparaître quand se fait une lumière suffisante ; — tantôt il déclare qu’elles sont différentes, tant des représentations que des sentiments de plaisir et de déplaisir, que ce sont des tendances éveillées par des représentations et accompagnées de sentiments de déplaisir ; et en cela elles se rattachent plus étroitement à l’aspiration ou à la volonté toujours en mouvement73. Si Leibniz avait développé ce dernier point de vue, il