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Alors que précédemment il était bien noté à la cour de Hanovre et était parvenu au titre de « conseiller privé », il semble que dans ses dernières années — après la mort de ses protecteurs princiers — il soit en quelque sorte tombé en disgrâce. Son orthodoxie était suspecte au clergé et au peuple parce qu’il n’allait pas au temple ; on expliquait son nom en bas-allemand par Lövenix, c’est-à-dire qui ne croit à rien (Glaube-nichts). À sa mort (1716), peu de gens seulement suivirent son cercueil. Sa devise était « Toute heure perdue, c’est une parcelle de la vie qui s’en va ». Elle fut mise sur son cercueil, ainsi qu’un symbole qu’il avait aimé : une spirale avec l’inscription : Inclinata resurget (elle ne s’incline que pour remonter).

b) Théorie des monades.

Après cet aperçu du développement historique de la philosophie de Leibniz, notre tâche sera d’en donner un exposé systématique. Les ouvrages qui doivent former surtout la base de cette étude sont : Discours de métaphysique (1685), Système nouveau, (1695), Lettre à Basnage (1698), De ipsa natura (1698) et la Monadologie (1714). Mais il faut consulter conjointement une foule de lettres et de petits traités.

Leibniz fonde sa philosophie par l’analyse des principes de la science de la nature. Il reconnaît ces principes sans restriction, comme Hobbes et comme Spinoza, mais il trouve qu’ils sont issus de conceptions plus profondes. Pour lui, la physique a sa raison dans la métaphysique. Il s’agit avant tout de voir comment d’après Leibniz il faut procéder à cette transition de la physique à la métaphysique.

Lorsque la science nouvelle vise à tout ramener au mouvement dans la nature, Leibniz approuve absolument cette tendance. Mais comme philosophe il demande : quelle réalité le mouvement possède-t-il lui-même, et quelle cause a-t-il ? — Tout mouvement est relatif. Si l’on croit qu’une chose se meut, cela dépendra du point de vue d’où l’on regarde cette chose. La réalité proprement dite, ce n’est pas le mouvement lui-même, mais la force qui en est cause et qui subsiste, alors même que le mouvement cesse. Les Cartésiens, qui enseignaient que la quantité de mouvement est toujours la même