Page:Höffding - Histoire de la philosophie moderne.djvu/350

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sophes et les savants de notre temps. Et même des penseurs qui officiellement ne voulaient pas le reconnaître étaient profondément et fortement influencés par lui. Cela est vrai notamment de l’homme qui a été posé souvent, par lui-même et par d’autres, comme l’antipode de Spinoza : Leibniz.

6. — Gottfried Wilhelm Leibniz

a) Biographie et caractéristique.

Chez Descartes, Hobbes et Spinoza, nous trouvons développés trois grands systèmes qui, malgré toutes leurs différences, ont ce trait de commun, qu’ils établissent un enchaînement naturel, purement mécanique, en ce qui concerne le côté matériel de l’existence. Dans ces systèmes, les conséquences étaient dérivées des principes dont l’établissement avait rendu possible la science exacte de la nature. C’étaient des tentatives faites pour montrer quel aspect prend l’existence, si ces principes sont absolument valables pour tous les phénomènes matériels (qu’on croie ou non qu’il y a d’autres phénomènes que les phénomènes matériels). Pour quantité de gens de la vieille école, ces principes et ces systèmes nouveaux étaient le type de l’arbitraire et de l’impiété. Une réaction est sensible vers la fin du XVIIe siècle, sous des formes différentes. Au point de vue de la philosophie cette réaction offre un très grand intérêt. Elle ne voulait pas renoncer aux résultats scientifiques vraiment acquis, et elle cherchait à dépasser la conception mécanique de la nature, non pas par le dehors, par un compromis, ou en rapprochant des éléments incompatibles, mais par le fond, en examinant les postulats qui étaient le fondement du nouveau système, qu’elle essayait de concilier avec la conception de l’antiquité et du moyen âge, avec laquelle on avait rompu avec tant d’énergie. En ce sens, Leibniz caractérise une réaction contre ces trois grands penseurs. Mais jamais peut-être réaction ne fut accomplie avec autant de profondeur d’esprit, bien que Leibniz se soit accommodé, sciemment ou non, dans son style des opinions conservatrices beaucoup plus qu’il n’avait le droit de le faire d’après son point de vue. Ce que dès le début Leibniz trouva choquant