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comme la cause immanente à tous les phénomènes (modi), c’est-à-dire la suppression du dualisme théologique de Dieu et du monde. De lui découle en outre l’impossibilité pour la cause d’être matérielle et l’effet spirituel, ou inversement, c’est-à-dire la doctrine de l’esprit et de la matière, considérés comme manifestations d’une seule et même existence, d’un seul et même enchaînement causal, et par suite la suppression du dualisme spiritualiste de l’âme et du corps. De même que la considération générale, selon la théorie de la connaissance, des conditions qui permettent de comprendre les données de l’expérience, porta Spinoza à établir le concept de substance (comme concept de la causalité hypostasée), de même la considération spéciale de la possibilité de comprendre le spirituel et le matériel, le fit aboutir à la théorie des attributs. Celle-ci dépend essentiellement de la conviction qu’il est possible de concevoir le côté matériel de l’existence comme un tout continu, et qu’il est impossible d’en faire dériver le côté spirituel de l’existence. Spinoza fait front aussi bien contre Descartes que contre Hobbes. Sa théorie des attributs est une tentative de résoudre les difficultés dont souffraient le Cartésianisme et le Hobbisme (le spiritualisme et le matérialisme). Il opposa au spiritualisme et au matérialisme une nouvelle hypothèse originale.

Spinoza n’a pas soutenu rigoureusement cette acception de la théorie des attributs. Au problème des rapports de l’esprit et de la matière il mêla en plusieurs endroits le problème des rapports de la connaissance avec son objet. Il est facile de voir que ce sont là deux problèmes différents ; l’esprit comme la matière (l’existence considérée à la fois par le côté spirituel et par le côté matériel) est objet de connaissance, et le problème de la connaissance se pose pour toutes les faces sous lesquelles l’existence peut être vue. Mais comme Spinoza, en sa qualité de philosophe dogmatique, se fiait tranquillement en la concordance de notre raison avec l’essence des choses, il devait, ainsi que nous l’avons développé, nécessairement croire qu’à tout rapport de pensée correspondait un rapport dans l’existence. Et il mêla cette théorie de l’identité telle qu’elle est pour la théorie de la connaissance avec la théorie de l’identité