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tions suprêmes de toute connaissance de l’existence. Le dogmatisme apparaît chez Spinoza dans la sûreté avec laquelle il établit et manie ces postulats comme des réalités, mais non en ce qu’il aurait absolument ignoré l’existence de ces postulats.

c) Principes fondamentaux du système.

α. En commençant son exposé déductif par une définition de ce qu’il entend par cause de soi-même et par substance, et en posant ce principe, que ce qui n’a sa cause en rien d’autre, doit l’avoir en soi-même, Spinoza n’a fait à vrai dire que postuler la possibilité d’une connaissance complète de l’existence. L’existence serait inconnaissable, si le principe de causalité n’était légitime, et la connaissance de la causalité ne pourrait être achevée, s’il n’y avait quelque chose qui eût sa cause en soi-même, sans renvoyer la pensée scrutatrice à autre chose encore, ainsi que le fait tout phénomène particulier. Lorsque Spinoza définit la substance « ce qui existe en soi-même et se comprend par soi-même, c’est-à-dire ce dont l’idée n’a besoin de l’idée d’aucune autre chose, dont elle serait formée » (per substantiam intelligo id, quod in se est et per se concipitur, hoc est id cujus conceptus non indiget conceptu alterius rei, a quo formari debeat), il ne donne pas d’après sa pensée, une définition purement subjective du concept ; il a formulé un fait objectif, une réalité donnée. Pour lui il n’y a pas de doute, la substance existe. Son existence est donnée ; mais si nous réfléchissions sur ce qu’est la substance, nous reconnaîtrions aussi que son existence est nécessaire, car il n’y a rien qui puisse l’exclure puisqu’elle a sa cause en elle-même. De même, de l’essence de la substance il découle qu’elle ne peut naître ou mourir ; qu’elle ne peut se diviser et se limiter ; qu’il ne peut y avoir qu’une seule substance. Toute autre chose, à laquelle nous adjugeons l’existence, ne peut être par conséquent que des attributs (attributa) de la substance unique ou des phénomènes individuels (modi, espèces), par lesquels elle se manifeste. De ce que dans l’existence se montrent des propriétés différentes. (telles que la conscience et l’étendue) que nous ne pouvons ramener à une forme commune, cela ne prouve pas (comme le croyait Descartes) qu’il faille croire à des subs-