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sens de l’involontaire à un degré bien plus élevé. Ce n’est pas lui qui aurait écrit une affirmation comme celle qu’énonce La Rochefoucauld : on ne pleure que pour se donner l’air d’avoir du cœur, ou pour être plaint, ou pour échapper à la honte de ne pas pleurer ! —

En ce qui concerne la psychologie de la volonté, on trouve chez Hobbes de bonnes remarques sur les rapports entre l’instinct, la réflexion et la volonté, dirigées contre la psychologie scolastique qui fait de la « volonté » un pouvoir particulier et abstrait, sans le relier aux formes élémentaires de l’activité. En outre par son petit ouvrage De la liberté et de la nécessité, dû à la discussion que Hobbes eut avec un évêque anglais, Hobbes a fourni une excellente contribution à la défense du déterminisme. L’évêque déclarait que si la volonté n’avait pas de cause, les lois seraient injustes en tant qu’elles défendent des actions ; la réflexion serait inutile, l’exhortation, la louange, le blâme et le châtiment vains, et les livres, les armes, les instruments et les médicaments n’auraient aucune utilité ; Hobbes répondit : la loi agit par la frayeur, c’est-à-dire par un mobile ; le châtiment ne doit pas torturer le criminel pour quelque chose d’irréparable, elle doit le corriger et intimider les autres ; sans réflexion souvent l’action devient mauvaise, elle n’est pas ce qu’elle aurait pu être, c’est ce qui fait que souvent on ne peut se passer d’instruments, de médicaments, etc. ; la louange et le blâme dépendent de l’utilité ou de l’influence pernicieuse de l’action, ils n’ont rien à voir avec la nécessité ou la non-nécessité.

f) Éthique et politique.

Hobbes fonde sa conception tout entière de la vie éthique et sociale sur l’instinct de conservation personnelle avec la même énergie qu’il appuie sa conception tout entière de l’existence sur les lois du mouvement mécanique. Peut-être demandera-t-on quel rapport il y a entre l’éthique et la politique de Hobbes d’une part et le reste de son système d’autre part ; or il a déjà fait lui-même cette concession, qu’il y a deux voies qui permettent d’aboutir à l’éthique et à la politique, les déductions tirées de la science des corps, et l’expérience psycholo-