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de notre sensation dans le monde extérieur. Quels sont les rapports de ces processus internes (action et réaction), c’est ce que Hobbes n’aborde pas. — Comme on le voit, Hobbes est un peu plus près de la physiologie antique et scolastique que Descartes, vu qu’il considère (pour la première fois toutefois dans le De corp., cap. 25, 4, et non dans les Elements of Law, I, 2, 8) le cœur comme le point d’origine de la sensation. Cette opinion lui a été certainement suggérée par les effets du sentiment liés à la sensation, où le cœur joue un rôle capital. Le cœur renferme l’origine de la vie ; il y a plaisir ou douleur, selon que l’excitation extérieure modifie le mouvement vital qui ne fait qu’un avec le mouvement du sang, c’est-à-dire selon qu’il le facilite ou l’entrave. C’est ce qui provoque encore une tendance involontaire à continuer le mouvement qui procure du plaisir ou à entraver le mouvement qui engendre la douleur. Ce besoin primitif (conatus primus) se manifeste déjà dans les mouvements du fétus.

Ce qui réellement se produit dans le monde, c’est pour Hobbes seulement du mouvement, mouvement hors de nous et en nous. Voilà pourquoi la subjectivité des qualités sensibles est chez Hobbes une conséquence de sa métaphysique du mouvement. Cependant il cherche à démontrer la subjectivité des qualités non seulement par voie déductive, mais aussi par voie inductive. Il signale que nous voyons les images des choses en des lieux où de fait elles ne se trouvent pas, par exemple dans les reflets, dans les rêves et dans les illusions des sens, — que des personnes différentes peuvent percevoir différemment les couleurs des choses, — que parfois nous voyons double, — que par suite d’un coup sur l’œil ou d’une pression exercée sur le nerf optique il se produit une lumière qui positivement n’est pas une lumière extérieure. Il en conclut que le contenu de nos sensations n’est que l’apparition de mouvements dans le cerveau et dans les nerfs, et qu’il n’est rien de réel.

La sensation nait d’une réaction de l’intérieur de l’organisme contre l’impression (a reactione cordis versus exteriora). Mais, ajoute Hobbes, on ne peut renverser cette phrase et dire que tout ce qui réagit est sensible. Tous les corps auraient alors des sensations ! Si même dans cette réaction il se pro-