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c’est-à-dire celui qui cherche. Il s’associe absolument à Descartes pour demander une explication mécanique de la nature (the mechanical hypothesis) par opposition à la doctrine scolastique des qualités et des formes. Pour lui la nature est la grande machine (the great automaton). Mais il souligne encore plus fortement que Descartes le caractère hypothétique de toute notre connaissance de la nature ; il recherche avec une grande ardeur toutes les raisons tendant à montrer que l’imperfection sera toujours inhérente à notre savoir ; et il indique que l’expérience progressive fait justement apparaître de nouveaux phénomènes qui peuvent nécessiter une modification de nos hypothèses précédemment formées. Il met fortement en relief, ainsi que les occasionnalistes, tout en étant indépendant d’eux, les difficultés que présente à la pensée l’hypothèse de l’action réciproque de l’âme et du corps, et comme Geulincx et Malebranche, mais avant eux, il aperçoit les difficultés qu’il y a dans tout rapport de cause à effet. « Nous ne connaissons, dit-il (Scepsis scientif, chap. xxiii), aucune cause par intuition immédiate, mais seulement par ses effets. Quand nous inférons qu’une chose est la cause d’une autre, nous ne faisons que nous appuyer sur ce fait que le premier accompagne toujours le second ; car la causalité en elle-même échappe à la sensibilité (causalily it self is unsensible). Mais déduire de cet accompagnement qu’il y a causalité, n’est pas nécessaire. » Glanvil annonce ici Hume. Il attache une importance particulière aux cas où la cause et l’effet sont très dissemblables et où pour cette raison nous ne pouvons avoir de connaissance claire et nécessaire de leur relation réciproque. Si malgré toutes ses tendances critiques et empiriques il a soutenu la croyance aux sorcières, c’est que, pensait-il, c’était faire preuve de dogmatisme que de vouloir contester la magie ; on ne peut savoir a priori quelles sont les causalités qui se produisent dans le monde. Son scepticisme le porta donc à ne pas avoir une confiance illimitée dans l’ « hypothèse mécanique ». Comme les esprits de même tendance que nous allons citer maintenant, il prouve que la pensée nouvelle n’avait pas encore réussi à chasser les idées du moyen âge.

Dominant tous les hommes de ce groupe, et très haut dans le