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vey de la circulation du sang influa fortement sur la marche de la pensée de Descartes.

En essayant d’expliquer tous les phénomènes matériels au moyen de l’étendue, de la divisibilité et de la mobilité considérées comme propriétés primordiales de la matière, Descartes suit un procédé déductif. Il va de la cause à l’effet. Il a pleinement conscience que par cette voie on ne peut aboutir qu’à une hypothèse, car il est toujours possible que les phénomènes donnés soient produits par d’autres causes que celles dont nous partons. Ici donc doivent venir s’ajouter les connaissances et les expériences comme moyens de vérification et Descartes déclare qu’il faudrait pour cela des expériences si nombreuses et si coûteuses qu’elles surpasseraient de beaucoup ses forces et ne pourraient se faire que grâce au concours d’un grand nombre d’hommes. Descartes n’accorde donc pas moins d’attention que Bacon à l’importance de l’expérience, mais il insiste encore plus que Bacon sur les principes directeurs et sur les hypothèses. Il se distingue également de Galilée par son goût pour les principes et les déductions. Il regardait le procédé déductif comme le procédé scientifique proprement dit, et il manquait de la faculté que possédait Galilée, de répandre par des recherches particulières la lumière sur des ordres de faits considérables et étendus. Et pourtant, dans son Discours de la méthode, il pose lui-même l’intuition liée à la perception particulière pour point de départ de la pensée. Son objet était autre que celui de Galilée. Sa mission était de montrer clairement que les temps étaient passés où l’on pouvait aboutir à une explication de la nature par la croyance aux forces mystiques ou à une intervention surnaturelle. Il établit l’idéal de toute science de la nature : dérivation des phénomènes de leurs causes avec la même nécessité évidente qu’une déduction mathématique découle de suppositions données. Le principe de simplicité, dont il s’autorise, est à proprement parler aussi le principe d’évidence. Il ne se trompe point sur le principe ainsi posé. Mais il attachait à l’application déductive des principes universels et aux hypothèses fondées sur ces principes plus d’importance qu’elles n’en ont réellement ; c’est ce qui donne à sa philosophie de la nature un