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a montré depuis que les lois du mouvement renferment la clef de toute connaissance scientifique de la nature matérielle. Galilée en avait déjà le pressentiment. Il déclare dans les Dialogues qu’il n’a jamais pu comprendre comment les substances pouvaient se transformer les unes dans les autres. Quand un corps présente des qualités qu’il n’a encore jamais possédées, il n’est pas impossible, à son sens, que cela soit l’effet d’une modification apportée dans l’ordre de ses parties ; et dans ce changement rien ne se perd et rien ne se crée. C’était exprimer clairement que l’on ne peut comprendre les variations qualitatives de la nature que si l’on peut les ramener à des variations quantitatives, c’est-à-dire, ici, à des mouvements dans l’espace. Alors se posa pour la philosophie des temps modernes la grande question de savoir comment elle devait se comporter vis-à-vis du grand principe qui était ainsi posé, et qui révéla victorieusement son utilité pratique dans tous les domaines de la nature l’un après l’autre.

d) La subjectivité des qualités sensibles.

Les exemples de Copernic et de Bruno ont déjà montré que la nouvelle conception du monde faisait poser le problème de la connaissance d’une nouvelle manière. Si la pensée était logique, l’image du monde donnée par la perception immédiate devait être remplacée par une autre totalement différente. C’est ce qui ressort encore plus clairement chez Galilée.

En mettant au fond de tant de questions importantes le principe de simplicité, il distingue expressément entre la facilité et la simplicité avec lesquelles procède la nature, et la méthode souvent compliquée et pénible qu’il nous faut appliquer pour nous convaincre de la simplicité de la nature. Ce qui pour nous est difficile à comprendre, est très facile à faire à la nature. Il ressort donc ici une opposition marquée entre l’existence et la connaissance. Galilée croyait que cette antinomie disparaît en quelque sorte dans la connaissance la plus claire que nous possédions, c’est-à-dire dans la connaissance mathématique. La connaissance humaine participe ici à la nécessité avec laquelle la divinité pense les vérités qui sont au fond de l’enchaînement de l’existence ; mais ce que nous pensons successivement en