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naissions pas par ses lettres. Il admire Copernic pour avoir pu, malgré le témoignage des sens, acquérir et garder la conviction que la terre tournait. Et il introduit lui-même au moyen de ses découvertes astronomiques toute une série de preuves que l’univers ne peut se diviser, ainsi que le croyait Aristote, en un monde céleste immuable et en un monde terrestre variable : les taches solaires et les nouvelles étoiles montrent qu’au ciel même il s’accomplit des modifications. Et de quel droit, fait observer Galilée, attribue-t-on à vrai dire à ce qui est invariable une valeur supérieure à ce qui est variable ? « Pour ma part, fait-il dire à Sagredo, je tiens la terre pour extrêmement insigne et admirable en raison justement des modifications et des créations nombreuses et différentes qui ne cessent de s’y produire. » À cela Simplicio objecte que les modifications ayant lieu sur la terre peuvent être un bien pour les hommes, mais que les changements dans le ciel seraient absolument inutiles. Il applique un raisonnement semblable à l’extension énorme que l’univers prendrait dans le système de Copernic (ainsi que Tycho-Brahé avait déjà remarqué) : quelle utilité a cet immense espace entre les planètes extrêmes et la sphère des étoiles fixes ? Dans sa réponse, Salviati applique aux causes finales la même considération que Simplicio dans un autre passage aux causes naturelles : comment aurions-nous la témérité de connaître les raisons du Tout-puissant ? Il y a tant de choses dans notre propre corps dont nous ne connaissons pas la signification ; comment pourrions-nous connaître la signification des objets plus éloignés ? Et quelle difficulté n’y a-t-il pas à découvrir comment une chose s’enchaîne dans l’ensemble auquel elle appartient, si l’on n’a pas la faculté de voir ce qui se produirait si on l’enlevait ? C’est mettre des bornes à la puissance divine, que de croire que les énormes dimensions de l’univers rendraient impossible son activité sur tous les points. Le soleil éclaire le raisin de ses rayons et le fait mûrir comme s’il n’avait rien d’autre à faire ; de même Dieu et la nature peuvent bien prendre soin de toute chose en particulier bien que l’univers s’étende à l’infini. — Galilée est d’abord porté à admettre (avec Bruno) l’immensité infinie de l’espace ; il doute qu’on, ait le droit de parler d’un centre du