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du monde, ouvrage qu’il avait souvent annoncé dans ses écrits précédents. Il pensait qu’il n’y avait pas de danger en s’exprimant hypothétiquement. Il se servit donc du procédé dont Osiander usa en faisant paraître l’ouvrage de Copernic. En 1632 parut son célèbre ouvrage, intitulé « Dialogue où pendant quatre jours de suite sont discutés dans des entretiens les deux plus importants systèmes du monde », celui de Ptolémée et celui de Copernic, et où les arguments philosophiques et naturels sont allégués à propos des deux conceptions sans prendre parti (indeterminamente) ». Les personnages de l’entretien sont Salviati et Sagredo, deux amis de Galilée, et Simplicio, le représentant de la philosophie d’Aristote. Salviati, c’est l’investigateur réfléchi à l’esprit analytique ; il produit les raisons, mais sans en tirer absolument aucune conclusion déterminée et cherche à retenir le fougueux Sagredo, par lequel Galilée épanche ses idées les plus libres, pour les faire désavouer, s’il est besoin, par Salviati. Mais le lecteur voit assez clairement de quel côté penchent les sympathies de l’auteur et à Rome on ne s’y laissa pas tromper. Le livre fut interdit et Galilée cité à Rome. Il est probable qu’il n’a pas été torturé réellement, mais seulement menacé de la torture ; mais le 22 juin 1633 il dut renier à genoux « la fausse doctrine d’après laquelle le soleil est le centre du monde et reste immobile, tandis que la terre n’est pas le centre et est au contraire mobile ». Il dut promettre sous la foi du serment « qu’à l’avenir il n’émettrait rien, ni de vive voix, ni par écrit, d’où on pût faire dériver cette doctrine et qu’au contraire il dénoncerait à l’Inquisition les personnes hérétiques ou suspectes d’hérésie qu’il viendrait à connaître » ! — Qu’il se soit parjuré, cela est hors de doute. Il ne renonça pas à sa conviction. Au lieu de le brûler physiquement, on lui infligea la cuisante douleur que cause la contrainte de taire sa propre conviction. Étant donnée sa nature, Galilée ne ressentait pas cette douleur aussi fortement que cela eût été le cas pour un Kepler, mais elle était toutefois assez forte pour lui rendre la vie amère. À cela s’ajoutèrent le chagrin et la cécité. Il vivait aux environs de Florence sous une surveillance constante, tout entier à ses idées scientifiques. La vie qu’il