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et que les rapports de ces traits soient vérifiés. Alors seulement on pourra avoir la certitude pleine et entière que l’image est valable. Plusieurs des savants qui subsistent comme les créateurs de la nouvelle science mécanique de la nature ont d’ailleurs poursuivi l’exécution du nouveau système du monde, de même qu’ils tirèrent en partie de ses rapports l’objet de leurs recherches mécaniques.

C’était encore une pensée empruntée à l’antiquité qui fut reprise ici. Archimède, le fondateur de la statique et de l’hydrostatique avait déjà exprimé au iiie siècle avant Jésus-Christ des pensées qui renfermaient le germe d’une conception mécanique de la nature. L’inclémence des temps força ce germe à attendre deux mille ans pour se développer. La tendance d’esprit d’Archimède ayant trouvé des conditions plus favorables d’existence, Archimède est dès lors parmi les auteurs qui furent étudiés, édités et traduits avec ardeur au xvie siècle. En réalité il s’agissait toutefois de fonder une science nouvelle. L’intérêt philosophique de cet événement repose sur son importance pour la vie de l’esprit, et cette importance est multiple. — Premièrement, il se développa alors une méthode nouvelle et par suite une application nouvelle de l’intelligence humaine qui influa profondément sur le caractère et sur la direction du développement de l’esprit. Des besoins et des habitudes nouvelles de l’esprit se formèrent. L’expérience et l’analyse passèrent avant la contemplation et la construction, si elles ne les supplantèrent pas absolument. — Deuxièmement, c’était surtout au côté matériel de l’existence que la méthode nouvelle pouvait s’appliquer. Il s’ensuivait naturellement la question de savoir quelle portée avaient les résultats acquis — s’ils renfermaient la connaissance de l’existence tout entière ou dans quel rapport ils se trouvaient avec le côté spirituel de l’existence. La révolution accomplie par la nouvelle conception du monde avait déjà révélé à de profonds penseurs que les énigmes de l’univers ne sont pas, ainsi que le croyait l’interprétation naïve, essentiellement situées en dehors et au-dessus de nous dans les grands rapports cosmiques, mais qu’elles se cachent dans notre propre fond et dans les phénomènes les plus humbles et les plus accessibles de la nature. C’est ce que la nouvelle