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mouvement du vaisseau. Si au contraire la pierre était jetée d’un point n’appartenant pas au vaisseau, elle tomberait un peu plus en arrière. Bruno commence ici à suivre le cours d’idées, grosses en conséquences, qui devait conduire plus tard Galilée à la découverte de la loi d’inertie.

En rapport étroit avec le principe de relativité se trouve chez Bruno le principe que la nature est partout essentiellement égale à elle-même (indifferenza della natura). Il conclut de l’état de choses, tel qu’il existe chez nous, à l’état de choses en d’autres lieux de l’univers. Une expérience de son enfance le mit sur cette voie. Du haut de la montagne de la Cicada près de Nole, qui s’étendait à ses pieds, couverte de forêts et de vignes, il regardait au loin le Vésuve, qui lui apparaissait à la fois petit, pelé et stérile. Mais y étant allé un jour, il vit que les deux monts avaient changé d’aspect ; c’était au tour du Vésuve d’être grand et boisé, et à la Cicada d’être petite et pelée. Le principe qui le mène à fonder et à agrandir le système de Copernic en établissant l’immensité infinie de l’univers, le mène tout naturellement aussi à admettre les mêmes relations partout où il ne se trouve pas d’expériences particulières pour les contredire. Il se représente dès lors les autres corps célestes comme semblables à la terre et les autres systèmes comme semblables au système solaire, de telle sorte que les étoiles fixes deviennent des soleils entourés de planètes. Il n’y a pas de raison pour admettre un principe autre que : les mêmes forces agissent partout. Mais alors Copernic n’a pas le droit de laisser, d’accord avec la conception commune, toutes les étoiles fixes à une égale distance de nous et dans une seule et même sphère. Peut-être ne conservent-elles toujours la même distance de nous et entre elles qu’en apparence. Les navires nous apparaissent au loin immobiles, et cependant ils avancent souvent avec une vitesse considérable. Si tel est le cas pour les étoiles fixes, c’est ce que pourront montrer des observations certainement longues à faire et peut-être encore non commencées. Mais si l’on n’a pas encore commencé des observations de ce genre, cela vient en droite ligne de la ferme conviction que l’on avait que les étoiles fixes ne modifiaient leur place ni par rapport à nous ni entre elles ! Il se révèle donc que le principe de l’ « in-