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VIE D’HOMÈRE.

qui offrait un sacrifice à Courotrophos. La-dessus il fit ces vers :

« Exaucez mes vœux, Courotrophos ; puisse cette femme avoir en horreur les caresses de l’aimable jeunesse ! qu’elle ne se plaise qu’avec des vieillards blanchis par l’âge, dont le cœur est brûlant et les sens sont émoussés. »

XXXI. Lorsqu’il fut au lieu où la Phratrie était dans l’usage de prendre ses repas, il s’arrêta sur le seuil de la porte, et, tandis qu’on allumait le feu dans la salle, il lui récita ces vers ; d’autres disent qu’on n’alluma le feu qu’après qu’il les eut récités :

« Un homme s’enorgueillit de ses enfants, une ville de ses remparts, une campagne de ses chevaux, la mer des vaisseaux qui la couvrent ; les richesses sont l’ornement d’une maison ; de respectables magistrats, assis sur un tribunal, font un spectacle admirable ; mais le plus beau spectacle, à mon avis, est celui du feu qui brille dans une maison un jour d’hiver, lorsque le fils de Saturne répand sur la terre la neige avec les frimas. »

Il entra, et, s’étant mis à table avec ceux de la Phratrie, ils lui témoignèrent de grands égards et beaucoup de respect. Il passa la nuit en ces lieux.

XXXII. Le lendemain il sortit. Des potiers de terre l’ayant aperçu tandis qu’ils faisaient chauffer leur four, ils l’invitèrent d’autant plus volontiers à entrer chez eux, qu’ils n’ignoraient pas qu’il était plein de talents. Ils le prièrent de leur chanter quelques-unes de ses poésies, et lui promirent de reconnaître sa complaisance en lui faisant présent de quelques-uns de leurs vases, ou de toute autre chose qui serait en leur pouvoir. Il leur chanta donc ces vers qu’on appelle le Fourneau :

« Potiers, si vous m’accordez la récompense promise, je vous chanterai ces vers. Accourez à ma voix, Pallas, protégez ce fourneau. Que tous les cotyles, que toutes les corbeilles se couvrent d’un beau noir, soient cuits à propos, et rapportent à leur maître un prix considérable. Qu’il s’en vende beaucoup au marché, beaucoup dans les rues ; que le profit en soit grand. Puissiez-vous, déesse, m’accorder de croître ainsi en sagesse !