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POLYMNIE, LIVRE VII.

mina avec soin ; mais il ne put voir les troupes qui étaient derrière la muraille qu’on avait relevée. Il aperçut seulement celles qui campaient devant. Les Lacédémoniens gardaient alors ce poste. Les uns étaient occupés en ce moment aux exercices gymniques, les autres prenaient soin de leur chevelure. Ce spectacle l’étonna : il prit connaissance de leur nombre, et s’en retourna tranquillement après avoir tout examiné avec soin ; car personne ne le poursuivit, tant on le méprisait.

CCIX. Le cavalier, de retour, raconta à Xerxès tout ce qu’il avait vu. Sur ce récit, le roi ne put imaginer qu’ils se disposassent, autant qu’il était en eux, à donner la mort ou à la recevoir, comme cela était cependant vrai. Cette manière d’agir lui paraissant ridicule, il envoya chercher Démarate, fils d’Ariston, qui était dans le camp. Démarate s’étant rendu à ses ordres, ce prince l’interrogea sur cette conduite des Lacédémoniens, dont il voulait connaître les motifs. « Seigneur, répondit Démarate, je vous parlai de ce peuple lorsque nous marchâmes contre la Grèce ; et lorsque je vous fis part des événements que je prévoyais, vous vous moquâtes de moi. Quoiqu’il y ait du danger à soutenir la vérité contre un si grand prince, écoutez-moi cependant. Ces hommes sont venus pour vous disputer le passage, et ils s’y disposent ; car ils ont coutume de prendre soin de leur chevelure quand ils sont à la veille d’exposer leur vie[1]. Au reste, si vous subjuguez ces hommes-ci et ceux qui sont restés à Sparte, sachez, seigneur, qu’il ne se trouvera pas une seule nation qui ose lever le bras contre vous ; car les Spartiates, contre qui vous marchez, sont le plus valeureux peuple de la Grèce, et leur royaume et leur ville sont les plus florissants et les plus beaux de tout le pays. » Xerxès, ne pouvant ajouter foi à ce discours, lui demanda une seconde fois comment les Grecs, étant en si petit nombre, pour-

  1. La chevelure longue distinguait l’homme libre de l’esclave. Lorsque les Lacédémoniens allaient affronter les plus grands dangers pour leur liberté, ils prenaient soin de leur chevelure. Plutarque ajoute que Lycurgue avait coutume de dire que les longs cheveux donnaient de la grâce aux beaux hommes, et rendaient les laids encore plus terrible. (L.)