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POLYMNIE, LIVRE VII.

plus habiles pour mettre une armée en bon ordre et pour la ranger en bataille ? Après un pareil témoignage, nous ne devons point rougir de parler avantageusement de notre patrie. »

CLXII. « Athénien, repartit Gélon, vous ne manquez point, à ce qu’il paraît, de généraux, mais de soldats. Au reste, puisque vous voulez tout garder, sans vous relâcher en rien, retournez au plus tôt en Grèce, et annoncez-lui que des quatre saisons de l’année on lui a ôté le printemps. » Il comparait par ce propos la Grèce, privée de son alliance, à une année de laquelle on aurait retranché le printemps.

CLXIII. Après cette réponse de Gélon, les ambassadeurs des Grecs remirent à la voile. Cependant Gélon, qui craignait que les Grecs ne fussent pas assez forts pour vaincre le roi, et qui d’un autre côté aurait cru insupportable et indigne d’un tyran de Sicile d’aller servir dans le Péloponnèse sous les ordres des Lacédémoniens, négligea ce plan pour s’attacher à un autre. Il n’eut pas plutôt appris que le roi avait traversé l’Hellespont, qu’il donna trois vaisseaux à cinq rangs de rames à Cadmus, fils de Scythès, de l’île de Cos, et l’envoya à Delphes avec des richesses considérables et des paroles de paix. Il avait ordre d’observer l’événement du combat, et si le roi était vainqueur, de lui présenter l’argent qu’il portait, et de lui offrir en même temps la terre et l’eau pour toutes les villes de ses États ; et si les Grecs au contraire remportaient la victoire, de revenir en Sicile.

CLXIV. Ce Cadmus avait auparavant hérité de son père la souveraineté de Cos. Quoiqu’elle fût alors dans un état de prospérité et que sa puissance y fût bien affermie, il l’avait cependant remise aux habitants sans y être forcé par des circonstances fâcheuses, mais volontairement, et par amour pour la justice. Étant ensuite parti pour la Sicile, il fixa sa demeure avec les Samiens à Zancle, dont le nom a été changé en celui de Messane. Gélon, persuadé des motifs qui l’avaient fait venir en Sicile, et de l’amour qu’il lui avait vu pour la justice en plusieurs autres occasions, l’envoya à Delphes. Il faut joindre à ses autres ac-