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TERPSICHORE, LIVRE V.

chacune de ces déesses dix choréges[1]. Ces chœurs n’invectivaient point les hommes, mais seulement les femmes du pays. Les Épidauriens avaient eu aussi chez eux de pareilles cérémonies, et ils en ont d’autres qu’ils tiennent secrètes.

LXXXIV. Ces statues ayant été enlevées, les Épidauriens cessèrent de s’acquitter des sacrifices dont ils étaient convenus avec les Athéniens. Ceux-ci, irrités de ce qu’ils manquaient à leurs engagements, leur en firent témoigner par leurs députés leur mécontentement ; mais les Épidauriens prouvèrent aux députés d’Athènes qu’ils ne faisaient point en cela d’injustice ; que, tant qu’ils avaient eu ces statues dans leur pays, ils avaient rempli leurs engagements ; mais que, depuis qu’elles n’étaient plus en leur possession, il n’était pas juste qu’ils payassent encore ce tribut, et qu’ils devaient l’exiger des Éginètes, qui en étaient les maîtres. Sur cette réponse, les Athéniens envoyèrent à Égine demander les statues ; mais les Éginètes leur dirent qu’ils n’avaient rien à démêler avec eux.

LXXXV. Les Athéniens racontent qu’après cette demande, ils envoyèrent sur une trirème, au nom de l’État, les citoyens qu’ils avaient déjà députés, et qu’étant arrivés en Égine, ils tâchèrent d’arracher ces statues de dessus leurs bases, afin de les emporter avec eux, comme étant d’un bois qui leur appartenait ; que, n’ayant pu s’en rendre maîtres de cette manière, ils leur passèrent des cordes pour les tirer ; mais que, pendant qu’ils les tiraient, il survint un tel coup de tonnerre, accompagné d’un si grand tremblement de terre, qu’ils en eurent l’esprit aliéné, au point qu’ils s’entre-tuèrent les uns les autres comme s’ils eussent été ennemis, et qu’il n’en réchappa qu’un seul qui se transporta à Phalère.

LXXXVI. Tel est le récit des Athéniens. Les Éginètes prétendent de leur côté que si les Athéniens n’avaient eu qu’un seul vaisseau ou seulement un petit nombre, ils les

    d’Anaphé, on se rendait Apollon propice lorsque, pendant le sacrifice, les femmes faisaient contre les hommes des plaisanteries indécentes. (L.)

  1. Les choréges présidaient aux chœurs, et réglaient la dépense qu’on faisait pour les acteurs, les danseurs et les musiciens dans les fêtes publiques.

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