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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

milieu du pays, qu’on appelle les Bunes (collines) : le blé et le raisin sont alors mûrs, et ne demandent qu’à être recueillis. Pendant qu’on fait la récolte du milieu des terres, ils viennent aussi en maturité dans les endroits les plus reculés, et veulent être moissonnés et vendangés. On a par conséquent mangé les premiers grains, et l’on a bu les premiers vins, lorsque la dernière récolte arrive. Ces récoltes occupent les Cyrénéens huit mois de l’année. Mais en voilà assez sur ce pays.

CC. Les Perses[1] qu’Aryandès avait envoyés d’Égypte pour venger Phérétime, étant arrivés devant Barcé, en firent le siége, après l’avoir sommée de leur livrer les meurtriers d’Arcésilas. Les Barcéens, étant tous coupables de la mort de ce prince, n’écoutèrent point leurs propositions. Pendant neuf mois que dura le siége, les Perses poussèrent des mines jusqu’aux murailles, et attaquèrent la place vigoureusement. Un ouvrier en cuivre découvrit leurs mines par le moyen d’un bouclier d’airain[2]. Il faisait le tour de la ville, dans l’enceinte des murailles, avec son bouclier, et l’approchait contre terre. Dans les endroits où les ennemis ne minaient pas, le bouclier ne rendait aucun son ; mais il en rendait dans ceux où ils travaillaient. Les Barcéens contre-minèrent en ces endroits, et tuèrent les mineurs perses. Quant aux attaques ouvertes, les habitants surent les repousser.

CCI. Le siége de Barcé durait depuis longtemps, et il s’y était fait de part et d’autre des pertes considérables, mais non moins fortes du côté des Perses que du côté des Barcéens, lorsque Amasis, qui commandait l’armée de terre, voyant qu’il ne pouvait les vaincre à force ouverte, résolut de les réduire par la ruse. Voici le stratagème qu’il imagina.

Il fit creuser pendant la nuit un large fossé, sur lequel

  1. Hérodote reprend ici la narration qu’il avait interrompue, § clxviii, par la description de la Lybie.
  2. Ce trait d’histoire prouve que l’art de faire des mines pour prendre une place est très-ancien, et que celui de les éventer ne l’est pas moins. Ce trait historique est précieux dans l’art d’attaquer et de défendre les places. Énée a très-bien fait de le rapporter. Voy. Æneas Poliorcet., §37, p. 1711. (L.)