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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

habitent en deçà du Pont-Euxin, nous ne pouvons pas en citer une seule qui ait donné des marques de prudence et d’habileté, ni même qui ait fourni un homme instruit, si ce n’est la nation scythe, et Anacharsis. Les Scythes sont, de tous les peuples que nous connaissions, ceux qui ont trouvé les moyens les plus sûrs pour se conserver les avantages les plus précieux ; mais je ne vois chez eux rien autre chose à admirer. Ces avantages consistent à ne point laisser échapper ceux qui viennent les attaquer, et à ne pouvoir être joints quand ils ne veulent point l’être : car ils n’ont ni villes ni forteresses. Ils traînent avec eux leurs maisons ; ils sont habiles à tirer de l’arc étant à cheval. Ils ne vivent point des fruits du labourage, mais du bétail, et n’ont point d’autres maisons que leurs chariots. Comment de pareils peuples ne seraient-ils pas invincibles, et comment serait-il aisé de les joindre pour les combattre ?

XLVII. Ils ont imaginé ce genre de vie, tant parce que la Scythie y est très-propre, que parce que leurs rivières la favorisent et leur servent de rempart. Leur pays est un pays de plaines, abondant en pâturages et bien arrosé : il n’est, en effet, guère moins coupé de rivières que l’Égypte l’est de canaux. Je ne parlerai que des plus célèbres, de celles sur lesquelles on peut naviguer en remontant de la mer. Tels sont l’Ister, fleuve qui a cinq embouchures ; ensuite le Tyras, l’Hypanis, le Borysthène, le Panticapes, l’Hypacyris, le Gerrhus et le Tanaïs. Je vais en décrire le cours.

XLVIII. L’Ister, le plus grand de tous les fleuves que nous connaissions, est toujours égal à lui-même, soit en été, soit en hiver. On le rencontre le premier en Scythie à l’occident des autres, et il est le plus grand, parce qu’il reçoit les eaux de plusieurs autres rivières. Parmi celles qui contribuent à le grossir, il y en a cinq grandes qui traversent la Scythie : celle que les Scythes appellent Porata, et les Grecs Pyretos, le Tiarante, l’Ararus, le Naparis et l’Ordessus. La première de ces rivières est grande ; elle coule à l’est, et se mêle avec l’Ister ; la seconde, je veux dire le Tiarante, est plus petite, et coule plus à l’occident : les trois dernières, l’Ararus, le Naparis et l’Ordessus, ont