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EUTERPE, LIVRE II.

forces, et disent des injures à celles de la ville ; celles-ci se mettent à danser, et celles-là, se tenant debout, retroussent indécemment leurs robes. La même chose s’observe à chaque ville qu’on rencontre le long du fleuve. Quand on est arrivé à Bubastis, on célèbre la fête de Diane en immolant un grand nombre de victimes, et l’on fait à cette fête une plus grande consommation de vin de vigne[1] que dans tout le reste de l’année ; car il s’y rend, au rapport des habitants, sept cent mille personnes, tant hommes que femmes, sans compter les enfants.

LXI. J’ai déjà dit comment on célébrait à Busiris la fête d’Isis. On y voit une multitude prodigieuse de personnes de l’un et de l’autre sexe, qui se frappent et se lamentent toutes après le sacrifice ; mais il ne m’est pas permis de dire en l’honneur de qui ils se frappent. Tous les Cariens qui se trouvent en Égypte se distinguent d’autant plus dans cette cérémonie, qu’ils se découpent le front avec leurs épées ; et par là il est aisé de juger qu’ils sont étrangers, et non pas Égyptiens.

LXII. Quand on s’est assemblé à Saïs pour y sacrifier pendant une certaine nuit, tout le monde allume en plein air des lampes autour de sa maison : ce sont de petits vases pleins de sel et d’huile, avec une mèche qui nage dessus, et qui brûle toute la nuit. Cette fête s’appelle la fête des lampes ardentes[2]. Les Égyptiens qui ne peuvent s’y trouver, ayant observé la nuit du sacrifice, allument tous des lampes ; ainsi ce n’est pas seulement à Saïs qu’on en allume, mais par toute l’Égypte. On apporte une raison sainte des illuminations qui se font pendant cette nuit, et des honneurs qu’on lui rend.

LXIII. Ceux qui vont à Héliopolis et à Buto se contentent d’offrir des sacrifices. À Paprémis, on observe les mêmes cérémonies et on fait les mêmes sacrifices que dans les autres villes ; mais, lorsque le soleil commence à

  1. Voyez la deuxième note de la page 153.
  2. Cette fête, qui ressemble beaucoup à celle des lanternes, établie à la Chine depuis un temps immémorial, pourrait servir à confirmer le sentiment de M. de Guignes, qui a soupçonné l’un des premiers que la Chine n’était qu’une colonie de l’Égypte. (L.)