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EUTERPE, LIVRE II.

même pleine lune. Ils en mangent alors. Mais pourquoi les Égyptiens ont-ils les pourceaux en horreur les autres jours de fête, et en immolent-ils dans celle-ci ? Ils en apportent une raison qu’il n’est pas convenable de rapporter. Je la tairai donc, quoique je ne l’ignore point.

Voici comment ils sacrifient les pourceaux à la Lune : quand la victime est égorgée, on met ensemble l’extrémité de la queue, la rate et l’épiploon, qu’on couvre de toute la graisse qui est dans le ventre de l’animal, et on les brûle. Le reste de la victime se mange le jour de la pleine lune, qui est celui où ils ont offert le sacrifice ; tout autre jour, ils ne voudraient pas en goûter. Les pauvres, qui ont à peine de quoi subsister, font avec de la pâte des figures de pourceaux ; et, les ayant fait cuire, ils les offrent en sacrifice.

XLVIII. Le jour de la fête de Bacchus, chacun immole un pourceau devant sa porte, à l’heure du repas ; on le donne ensuite à emporter à celui qui l’a vendu. Les Égyptiens célèbrent le reste de la fête de Bacchus, excepté le sacrifice des porcs, à peu près de la même manière que les Grecs ; mais, au lieu de phalles, ils ont inventé des figures d’environ une coudée de haut, qu’on fait mouvoir par le moyen d’une corde. Les femmes portent dans les bourgs et les villages ces figures, dont le membre viril n’est guère moins grand que le reste du corps, et qu’elles font remuer. Un joueur de flûte marche à la tête ; elles le suivent en chantant les louanges de Bacchus. Mais pourquoi ces figures ont-elles le membre viril d’une grandeur si peu proportionnée, et pourquoi ne remuent-elles que cette partie ? On en donne une raison sainte ; mais je ne dois pas la rapporter.

XLIX. Il me semble que Mélampus, fils d’Amythaon, avait dès lors même une grande connaissance de cette cérémonie sacrée. C’est lui en effet qui a instruit les Grecs du nom de Bacchus, des cérémonies de son culte, et qui a introduit parmi eux la procession du phalle. Il est vrai qu’il ne leur a pas découvert le fond de ces mystères ; mais les sages qui sont venus après lui en ont donné une plus ample explication.

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