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CLIO, LIVRE I.

appris de vous avec certitude ce que nous devons faire. » Le dieu lui fit la même réponse, et lui commanda de rendre Pactyas aux Perses. Sur cela, Aristodicus alla, de dessein prémédité, autour du temple, et enleva les moineaux et toutes les autres espèces d’oiseaux qui y avaient fait leurs nids. On raconte que tandis qu’il exécutait son dessein, il sortit du sanctuaire une voix qui s’adressait à lui, et lui disait : « Ô le plus scélérat de tous les hommes, as-tu bien la hardiesse d’arracher de mon temple mes suppliants ? » et qu’Aristodicus, sans se déconcerter, lui répondit : « Quoi ! grand dieu, vous secourez vous-même vos suppliants, et vous ordonnez aux Cyméens de livrer le leur ? — Oui, je le veux, reprit la même voix ; et c’est afin que, ayant commis une impiété, vous en périssiez plus tôt, et que vous ne veniez plus consulter l’oracle pour savoir si vous devez livrer des suppliants. »

CLX. Sur le rapport des députés, les Cyméens envoyèrent Pactyas à Mitylène, ne voulant ni s’exposer en le livrant, ni se faire assiéger en continuant de lui donner un asile. Mazarès ayant fait redemander Pactyas aux Mityléniens, ils se disposaient à le lui remettre moyennant une certaine récompense ; ce que je n’ose cependant assurer, parce que la convention n’eut pas lieu. Les Cyméens, ayant eu connaissance des desseins des Mityléniens, envoyèrent à Lesbos un vaisseau qui transporta Pactyas à Chios.

Les habitants de cette île l’arrachèrent du temple de Minerve Poliouchos, et le livrèrent à Mazarès, à condition qu’on leur donnerait l’Atarnée, pays de la Mysie, vis-à-vis de Lesbos. Lorsque les Perses eurent Pactyas en leur puissance, ils le gardèrent étroitement, à dessein de le présenter à Cyrus. Depuis cet événement, il se passa beaucoup de temps sans que les habitants de Chios osassent, dans les sacrifices, répandre sur la tête de la victime de l’orge d’Atarnée, ni offrir à aucun dieu des gâteaux faits avec de la farine de ce canton, et on excluait des temples tout ce qui en provenait.

CLXI. Les habitants de Chios n’eurent pas plutôt livré