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les danses, les bons mots et les chansons. Quant aux événements qui se sont passés à Rome, qu’aucun de vous ne s’en effraye. Vitalien a péri sans doute ; il a été tué par surprise et par ruse ; mais vous n’ignorez pas la légèreté, l’inconstance du peuple romain, son audace qui se borne à de vaines clameurs. Qu’ils voient seulement deux ou trois hommes armés, ils vont se pousser, se fouler aux pieds les uns les autres ; chacun ne songera qu’à fuir son propre danger, sans se soucier en rien du péril commun. Si quelqu’un vous a fait connaître aussi la conduite des sénateurs, ne vous étonnez pas que ma vie sobre et réglée leur ait paru trop sévère, et qu’ils préfèrent, dans les mœurs efféminées de Gordien, des inclinations conformes aux leurs. Ils appellent cruauté les vertus guerrières, les actions glorieuses ; ils aiment les mœurs dissolues ; ils appellent la débauche douceur et modération ; aussi sont-ils ennemis de mon gouvernement, trop actif, trop modéré ; ils se réjouissent au contraire au seul nom de Gordien, dont vous connaissez la vie infâme. C’est contre de tels hommes que nous avons la guerre à soutenir, si l’on veut donner le nom de guerre à une pareille expédition. J’en suis convaincu, soldats, dès que nous aurons touché l’Italie, la plupart, nous présentant des branches d’olivier et leurs enfants, viendront se prosterner à nos pieds ; les autres, frappés de terreur, fuiront lâchement.