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héréditaire. Il était grand et massif, moustachu de gris, et sa figure épaisse avait toujours une expression un peu gênée de bonne humeur arrêtée court par l’annonce d’un chagrin d’autrui, auquel il devait faire semblant de compatir.

Le père Chapdelaine, ayant dételé et soigné son cheval, rentra dans la maison à son tour. Il s’assit à distance respectueuse avec ses enfants pendant que le médecin remplissait ses rites. Ils pensaient tous :

« Maintenant on va savoir ce que c’est, et il va lui donner de bons remèdes… »

Mais quand l’examen fut fini, au lieu d’avoir recours de suite aux philtres de son sac, il resta hésitant et se mit à poser des questions sans fin. Comment cela avait commencé, et de quoi elle se plaignait surtout… Si elle avait déjà souffert du même mal… Les réponses ne semblèrent pas l’éclairer beaucoup ; alors il s’adressa à la malade elle-même, mais n’obtint d’elle que des indications vagues et des plaintes.

— Si ça n’est rien qu’un effort qu’elle s’est donné, fit-il à la longue, elle guérira toute seule : elle n’a qu’à rester au lit sans bouger. Mais si c’est une lésion dans le milieu du corps, aux rognons ou ailleurs, ça peut être méchant.

Il sentit confusément que le doute où il restait plongé désappointait les Chapdelaine, et voulut rétablir son prestige.

— Des lésions internes, c’est grave, et on ne