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CHAPITRE QUATRIÈME


L’expression de la vie individuelle et sociale
dans l’art.


I. — L’art ne recherche pas seulement la sensation. — Il cherche l’expression de la vie. — Lois qui en résultent. — Impuissance du pur formalisme dans l’art. — Flaubert. — Le fond vivant doit toujours transparaître sous la forme.

II. Les idées, les sentiments et les volontés constituent le fond de l’art. — Nécessité des idées et de la science pour renouveler les sentiments mêmes.

III. Le but dernier de l’art est de produire la sympathie pour des êtres vivants. — À quelles conditions un être est-il sympathique. Nécessité de l’individualité. Nécessité d’un côté universel et social des types. — Le conventionnel et le naturel dans la société et dans l’art. Moyens d’échapper au conventionnel.


I. — L’art poursuit deux buts distincts : il cherche à produire, d’une part, des sensations agréables (sensations de couleur, de son, etc.), d’autre part, des phénomènes d’induction psychologique aboutissant à des idées et à des sentiments de nature plus complexe (sympathie pour les personnages représentés, intérêt, pitié, indignation, etc.), en un mot, tous les sentiments sociaux. Ces phénomènes d’induction sont ce qui rend l’art expressif de la vie.

Toutes les fois que l’art a pour objet les sensations, il se trouve en présence de lois scientifiques dont un grand nombre sont absolument incontestables. L’esthétique, par ce côté, touche à la physique (optique, acoustique, etc.), aux mathématiques, à la physiologie, à la psycho-physique.

La statuaire repose spécialement sur l’anatomie et la physiologie ; la peinture, sur l’anatomie, la physiologie et l’optique ; l’architecture, sur l’optique (la règle d’or, etc.) ; la musique, sur la physiologie et l’acoustique ; la poésie, sur la métrique, dont les lois les plus générales se rattachent assurément à l’acoustique et à la physiologie.