Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, I.djvu/383

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
383
LOYS XI.

effet, on me croit mort, et cependant je fais bien assez pour occuper dignement une existence royale, j’envoie des messagers partout. Et que faire ? (Coitier paraît.) Approche, Coitier, je souffre, je souffre beaucoup ; des frissons, la fièvre, et des faiblesses, comme tu sais, mais plus fort que de coutume.

Coitier

Mais non, sire.

Louis XI

Tu te trompes, Coitier. Je vais te confier un secret, je me sens chaque jour… ah !… et quand le moment sera venu, tu diras seulement : il est temps, sire ; car ce mot, la mort, m’effraie.

Coitier

Bien, sire.

Louis XI

Et puis chaque jour je suis plus triste, j’ai un fils, n’est-ce pas, Coitier ?

Coitier

À Amboise.

Louis XI

Il me hait peut-être, mais je veux le voir ; tu entends, Coitier ? tu diras à quelqu’un de l’aller chercher avant peu.

Coitier

Oui, sire.

Louis XI

Cela me fera du bien de voir ce jeune enfant. Il a douze ans, n’est-ce pas ? il est encore pur, sans amertume et sans fiel ; mais peut-être, lui, aura-t-il peur de ma figure amaigrie et de mon front pâle.

Coitier

Rassurez-vous, sire, votre fils !