Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, I.djvu/310

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chiffonner une robe, écouter mon cœur qui fait tic tac, baiser une gorge grasse, que de manger un jambon doré, entrelardé de blanc, couronné d’ail, de guirlandes de boudins et de festons de saucisses ; et il y en a cependant qui valent bien en grosseur et largeur le cul d’un moine ou la mine d’un pape !

Louis XI, presque pleurant.

Enfin ! quand viendra-t-il donc ?… Il va venir, et puis… oh ! (À Bamboccio.) Dis donc, mon cher fou, mon mignon, mon cher ami, que j’ai toujours traité comme un enfant, écoute.

Le fou,
sans l’écouter, les bras étendus, la gourde d’une main, son bonnet de l’autre, criant à tue-tête.

Oh ! j’aime en hiver à gratter mes poux au soleil, et en été a boire à l’ombre.

Louis XI

Écoute ton maître.

Le fou

Après.

Louis XI

Tu sais que nous sommes ici chez Charles ?

Le fou

Oui ! oui ! mauvais vin.

Louis XI

Et que les Liégeois se sont révoltés, que le Duc est en colère, une colère de géant ou de bête féroce, et qu’il va venir, qu’il va me tuer. Dis, crois-tu qu’il vienne ? Oh ! non, il ne viendra pas ! sans doute quelque affaire pressée l’aura retenu, il sera parti subitement en Allemagne, que sais-je ?… Oh ! je t’en prie, dis-moi donc qu’il ne va pas venir, qu’il ne viendra pas, car tu dois le savoir, toi ! tu étais là ! Dis-moi