Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, I.djvu/282

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Vanderiesche

Voilà un drôle qui, tout Flamand qu’il est, n’est pas bête, et je crois qu’il est aussi difficile de lui tirer les réponses de la bouche que le crédit de sa boutique.

Cousinot, lui frappant sur l’épaule.

Eh quoi ! l’ancien, n’êtes-vous pas brave Gantois ?

Le tavernier

Oui vrayment.

Cousinot

Et ne voulez-vous pas, comme nous autres, l’abolition des impôts sur le blé, sur le sel, sur le vin ? ne voulez-vous pas avoir les anciens chaperons de nos pères ?

Le tavernier

Eh, sans doute !

Vanderiesche observe.
Cousinot

Eh bien donc, à bas le Duc ! et vive nos bannières !

Le tavernier

D’accord, mais il Faut voir comment tout cela ira.

Cousinot

Au diable soit le cafard ! vous êtes lourd comme votre bière, bonhomme, aussi poltron qu’un Fond de culotte usée, qui n’ose pas se montrer au grand jour.

Le tavernier

Et s’il est plus fort, M. de Charolais, que deviendrai-je ? car ma taverne était celle de MM. les archers et officiers de feu son père, ils venaient tous boire ici, ma Femme leur faisait les yeux doux, mon fils jouait de la trompette et moi je leur chantais des chansons joyeuses ; encore que nous avons de jolies chambres