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INTRODUCTION. xxxj


en vain la tenir, si l'on n'a fait que l'embrasser comme on embrasse si souvent l'erreur ; j'ai donc cherché les différences des mots synonymes dans leur valeur matérielle ou dans leurs éléments constitutifs, par l'analyse, par l'étymologie et par les rapports sensibles, tant de son que de sens, qu'ils ont avec des mots de différentes langues. "


Composé d'après cette méthode, l'ouvrage de l'abbé Roubaud doit être considéré sous trois points de vue principaux : 1°. l'étymologie ; 2°. la classification d'un grand nombre de mots d'après leur terminaison ; 3°. la synonymie proprement dite.


C'est à ses recherches étymologiques que l'abbé Roubaud paraît avoir mis le plus d'importance ; on peut même dire qu'il leur doit presque entièrement ses succès : son érudition, la nouveauté de l'application qu'il en sut faire, d'heureuses rencontres, ont fait regarder cette partie comme la meilleure, la plus solide de son ouvrage : je ne crains pas de dire que c'est la plus faible, la plus hasardée, et qu'elle aurait obtenu moins d'éloges, si le public avait été un peu plus familiarisé avec les connaissances philologiques. Elève de Court de Gébelin, l'abbé Roubaud, grand admirateur des idées et des travaux de son maître, avait adopté sa méthode, la plupart de ses principes, et entre autres cette hypothèse, si souvent renouvelée depuis, qui fait du Celtique la source de toutes les langues européennes, anciennes ou modernes, et même de plusieurs langues de l'Asie occidentale. C'est là la base, l'âme, pour ainsi dire, de toutes ses recherches étymologiques. Il serait inutile de donner ici à la discussion de ce système un grand développement ; je me bornerai à quelques observations qui en feront sentir la faiblesse et l'inconséquence.


Rien n'est plus dangereux que de confondre les langues dont la grammaire est entièrement différente : c'est vouloir ôter à la philologie le seul guide sûr qu'elle puisse avoir, c'est éteindre le seul flambeau qui puisse l'éclairer dans sa marche : c'est cependant ce qu'ont fait les partisans de Court de Gébelin, et parmi eux l'abbé Roubaud. Avec de l'adresse, des tours de force et des assertions, on établit un système ; mais si, au lieu de contribuer aux progrès de la science, il ne tend qu'à la plonger dans l'incertitude et dans le vague, s'il ne s'appuie que sur des