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même vérité, si cela est nécessaire. Priez pour moi, comme il convient à Votre Très Chère Béatitude, afin que mes œuvres soient en rapport avec les paroles que j’ai osé vous adresser. »



VIII



Nous demandons si c’est là le langage d’un supérieur à l’égard de ses subordonnés ? Saint Grégoire, en sa qualité de premier évêque de l’Église, de premier des patriarches, prend l’initiative, appelle l’attention des autres patriarches, ses frères, sur les usurpations de l’un d’entre eux ; il les prie de s’unir à lui pour résister à ce qu’il regarde comme un malheur pour l’épiscopat tout entier, même pour l’Église universelle. Il ne fait pas la plus légère allusion à l’autorité supérieure qu’il aurait possédée ; il n’en appelle qu’aux préceptes divins et aux canons contre une usurpation qu’il qualifie de diabolique. Encore une fois, est-ce là le langage d’un chef, d’un monarque universel ? Non, évidemment. On ne peut lire cette belle lettre de saint Grégoire aux patriarches d’Antioche et d’Alexandrie sans être persuadé que la papauté, telle qu’on la prétend être aujourd’hui de droit divin, lui était inconnue ; qu’il s’éleva contre les premiers essais de cette papauté, dans la personne de Jean de Constantinople ; qu’il considéra ces premiers essais comme l’effet d’un orgueil qui ne pouvait venir que du diable, comme une entreprise capable de bouleverser l’Église, attentatoire aux droits du sacerdoce tout entier, sacrilége, impie et inepte.

Si saint Grégoire considérait ainsi les premières tentatives d’une papauté universelle, que dirait-il de cette papauté elle-même, avec toutes ses prétentions modernes ? Il s’en montrerait, avec raison, le plus grand ennemi, et il verrait en elle la source de tous les maux dont l’Église est accablée depuis des siècles.