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Seul d’entre eux, j’ai connu les noirs hivers de Gaule,
Et l’exil triomphal au bord du Rhin gelé,
Et Lutèce où la pourpre accabla mon épaule,
Lutèce, chère encore, où les Dieux m’ont parlé,

Quand, des cercles tracés sur le disque nocturne,
Toute blanche, au milieu d’un nuage augurai,
La Vierge, surgissant, à mon cœur taciturne
Transmit la force intime et l’ordre sidéral.

Sans plaintes, sans orgueil et sans joie insensée,
Sans faiblir, j’ai porté mon fardeau glorieux ;
Mais le trône romain ne fut dans ma pensée
Qu’un plus haut piédestal pour y placer les Dieux.

Eux seuls, les Dieux d’Hellas, qu’un nouveau culte offense.
Harmoniques, brillants, purs et consolateurs,
Eux que j’ai vus raillés et livrés sans défense
Aux chiens Galiléens ignorants et menteurs ;

Vils, furieux, démons écumants dont la haine,
Toujours exaspérée et sourde au repentir,
Au delà du tombeau poursuit la race humaine
Et d’un esclave en croix veut faire un Dieu-martyr !

L’impiété gonflait leurs âmes révoltées,
Et, d’un voile funèbre assombrissant nos jours,
La moitié de l’Empire honorait les athées.
Le serpent venimeux sifflait dans leurs discours.