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Le vent de l’anathème et ses clameurs farouches,
Ceindre le bandeau d’or, avoir considéré
Le glaive impérial presque à demi tiré,
Etre évêques, savants, puissants, dépositaires
Du droit apostolique et des divins Mystères,
Etre les plus nombreux, les plus saints, être là
Devant l’autel, devant l’Empereur : tout cela
Pour tarder, discourir, argumenter, entendre
L’hérésie attaquer et l’erreur se défendre
Et peut-être, tant l’homme est faible, triompher !
Exaspérer la flamme au lieu de l’étouffer,
O cieux ! éterniser dans l’Église et les villes
Le tumulte et l’effroi des révoltes civiles,
Lasser en vain sa langue ou la prostituer,
Laisser le temps de mordre au chien qu’on peut tuer
Et relâcher le loup quand il est pris au piège,
O faute, ô douleur ! Telle une âpre crainte assiège
Les cœurs irrésolus des Pères. On se tait.
Chacun reste à son rang comme s’il méditait ;
Et, dans la salle énorme où le silence tombe,
En son vol incertain l’invisible Colombe,
Cherchant où se poser, ne trouve pas un front.

Mais soudain frémissant, impatient, plus prompt
Que le cheval numide au souffle des trompettes.
Un homme bondit, jeune, intrépide ; et les têtes
Angoisseuses, les yeux pleins de haine ou d’espoir,
Vers l’ombre de l’autel se tournent pour le voir.
Un nom vibre ; il grandit, il éclate : — Athanase ! —