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Le lentisque, l’encens que le Liban distille,
La cannelle fleurie et la myrrhe subtile
Crépitaient. Sur un lit pétillant de sarments,
Avec des éclats brefs et de hauts flamboiements
Vers les cieux embaumés fumaient les aromates.
Et Jésus au milieu des flammes écarlates
Prit le vase d’airain que l’onde avait rempli,
Le bénit en silence et le voila d’un pli
De sa robe ; et soudain sur le tertre de sable
Un vin miraculeux, sanglant, intarissable,
Noya le clair foyer sans éteindre le feu.

Tout se tait. Un rayon céleste, vague et bleu,
S’épanche de la Lune et flotte dans l’espace,
S’irise, atteint les monts lointains, descend, dépasse
Le faîte des palmiers et fixe en frémissant
Sur le front du Sauveur son trait resplendissant.
Et la clarté blanchit, s’épanouit, se dore ;
De l’intacte blancheur naît une immense aurore,
Et la lumière vit, jaillit, croît en splendeur.
Illuminations, rayonnements, candeur
De la neige éclatante à l’aube sur les cimes,
Pourpres du grand soleil à ses couchers sublimes,
Étincelant azur des matins radieux,
Les lueurs de la terre et les astres des cieux,
Tout se fond et palpite en une flamme unique.
Et dans l’éblouissante et divine tunique,
Jésus, vêtu de gloire, environné d’éclairs,
Plane dans la hauteur et parle dans les airs :