Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/250

Cette page n’a pas encore été corrigée


Ils vont, tristes et lents, ils vont, les derniers Sages
Qu’Athènes a nourris sous ses lauriers fanés,
Suprêmes héritiers des beaux et nobles âges,
Gardiens des blancs autels et des Dieux condamnés.

L’édit impérial les chasse et les disperse,
Loin de la Grèce en proie au Dieu, nié par eux ;
Et seule, hospitalière et barbare, la Perse
S’ouvre comme un asile à leurs pas douloureux.

Enfermant en leur sein la Sagesse et ses rêves,
Les exilés pensifs pour la dernière fois
Ont du bleu Sounion baisé les saintes grèves
Et salué la mer, la colline et les bois.

Pour la dernière fois dans la lumière attique
L’Acropole a fleuri sur le sommet divin.
L’ombre d’un voile impie a couvert le Portique
Et le faîte éternel et l’éclatant ravin.

Fraternels, résignés, austères, sans parole,
Les Sept, voilant leurs fronts, pleurent le sol sacré ;
Et l’ancien souvenir de la vivante École
Comme un amer parfum emplit leur cœur navré.

Où sont les clairs éveils des aubes toujours chères
Où, pieux, à la grave et céleste Raison
Les Ephèbes nombreux, groupés autour des chaires,
De leur jeunesse ardente offraient la floraison ?