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Et, baigné de parfums, ceint de fleurs funéraires,
Dans un ciel pâlissant régner avec ses frères.

Mais, avant lui, la Terre avait bu l’âcre vin
De la souffrance humaine et du tourment divin.
Le sacrifice, au fond des antiques ruines,
Avait, sanglant et libre, enfoncé ses racines,
Et l’amour et la mort avaient déjà fleuri.


PHŒBION.

Tristes fleurs s’inclinant sur un rameau pourri !
Qu’attendez-vous, amis, des cultes que suggère
Aux peuples anxieux une ivresse étrangère ?
Tels, échappés soudain des ardents horizons,
Les souffles libyens, chargés de chauds poisons,
Au milieu du chemin couchent les caravanes,
Tels, je crains ces transports, ces hurlements profanes,
Ces cortèges impurs, ces péplos en lambeaux,
Et ces longs pleurs versés sur d’amoureux tombeaux.
Dans les corps énervés flottent de faibles âmes.
Mais nous, indifférents, sourds aux sanglots des femmes,
Contre les vains assauts des passions sans frein,
Comme des boucliers, tendons des cœurs d’airain.
Stoïquement soumis aux rigides doctrines,
Aux lâchetés du siècle opposant nos poitrines,
Sans pitié, sans espoir, sans abaisser nos fronts,
Remplissons nos destins, vivons, luttons, mourons.
Que la douleur pour nous soit une vile esclave