Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/203

Cette page n’a pas encore été corrigée


Et sur l’effondrement des machines en flammes,
Sur le choc des béliers, sur la chute des tours,
Plane, jamais lassé, le hurlement des femmes,
Amoureux et funèbre, inassouvi toujours :

— Adônis ! Adônis ! l’amour dont tu nous sèvres
        Consume nos cœurs haletants ;
La volupté disperse avec les longues fièvres
        Tous les effluves du printemps. —

Et le vent printanier, chargé d’odeurs magiques,
Portant aux défenseurs l’écho désespéré,
Verse en leurs seins troublés les langueurs léthargiques
Qui font des faibles poings choir le glaive acéré.

— Adônis ! Adônis ! que les voix des pleureuses
        Frappent seules les cieux ternis,
O Seigneur, embaumé par nos mains douloureuses
        A l’ombre d’un berceau d’anis ! —

Vils troupeaux, résignés aux sanglants holocaustes,
Mêlant d’âpres sanglots aux lamentables chœurs,
Les soldats énervés ont oublié leurs postes
Et déserté la brèche où montent les vainqueurs.

— Adônis ! Adônis ! Préféré d’Aphrodite
        Au sein rose, au baiser vermeil,
Mystérieux Époux, sors de la nuit maudite
        Dans les parfums et le soleil ! —