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HYMNE À LA BEAUTÉ

Déesse, tu parus. L’aigle des monts déserts,
À ton char attelé, t’emporta dans les airs,
Inextinguible météore ;
Et la forêt s’emplit de souffles inconnus,
Et tu vis se courber pour baiser tes pieds nus,

Ô Beauté ! l’océan sonore.

L’ombre s’évanouit ; l’ombre s’épanouit ;
Tout est joie et lumière et l’on entend, la nuit,
Se ruer la foule mouvante
Des monstres du chaos effarés et géants,
Et des troupeaux de sphinx choir aux gouffres béants,
Dans une fuite d’épouvante.

Ô Beauté ! le lion lèche le faon naissant ;
Le tigre apprivoisé n’asperge plus de sang
Le doux mystère des nymphées ;
L’ours en ses bras velus berce l’agneau frileux ;
Le Centaure brutal suit vers les coteaux bleus
La marche auguste des Orphées.

Où s’émeut une lyre une âme chante aussi ;
La Nature domptée y répond, et voici
Que l’Harmonie éclate et vibre.
Une haute voix sort des chênes inspirés,
Et les poèmes saints et les hymnes sacrés
Coulent du cœur de l’homme libre.