Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/84

Cette page n’a pas encore été corrigée


L’Unique existait seul par essence, un et triple,
Et s’engendrant lui-même en son éternité,
Générateur fécond de l’Univers multiple,
Inconnaissable, pur, parfait, illimité,
Ancêtre des aïeux, mère des mères, âme
Et corps, de sa substance enfantant dans la flamme
Ses membres personnels qui sont les Dieux naissants.
Et l’Unique vogua sur les ondes célestes,
Selon son cours, ses noms, ses formes manifestes,
Caché dans le mystère à nos yeux impuissants.

Puis, dans la nuit des temps insondables, sorties
Du sein des Dieux, Seigneurs des doubles horizons,
Tu vis, ô sol de Kern, naître les Dynasties
Germant l'une après l’autre ainsi que les moissons
Vont succédant toujours à celles déjà mortes.
Et Mena le premier fit le mur et les portes
Du premier sanctuaire, au port de Man-Nofri.
Et le Nil régulier baignait les champs humides,
Et dans l’âpre désert, au creux des Pyramides,
Les races dérobaient leur funéraire abri.

Et les Dieux, incarnés en des formes vulgaires,
Gardaient les Pharaons, des peuples obéis.
Les greniers florissants débordaient et les guerres
Brisaient leur choc rapide au seuil du noir Pays.
Et d’âge en âge, au fond des siècles, sans relâche,