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J’ai mesuré le globe et sais combien de stades
Séparent les tribus de Libyens nomades
        Des pâles Hyperboréens,
Et depuis quand les mers ont réuni leurs ondes
Par le détroit nouveau qu’ouvrit entre les mondes
        L’effort des bras Hérakléens.

La Terre primitive est une sphère énorme,
Rugueuse, irrégulière, abrupte, que déforme
        L’ébranlement des sourds volcans.
Sa surface se creuse en profondeurs de gouffre,
D’où s’échappent, chargés d’exhalaisons de soufre,
        Les vents malsains et suffocants.

En quels siècles muets de la nuit insondable
Les déserts ont-ils vu l’Océan formidable
        Inonder le sable vermeil,
Et les barques glisser où sont les Pyramides,
Et près des bleus étangs bâiller les chéramides
        Ouvrant leurs valves au soleil ?

Jadis les humbles nefs que le flot noir ballotte,
De rivage en rivage errantes, sans pilote,
        Ignoraient les essors lointains ;
Et voilà qu’aujourd’hui, sur les eaux découvertes,
Vous voyez, loin des ports, fuir les vaisseaux alertes.
        Confiés aux astres certains.