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ense voûte
Du firmament, soleils, étoiles que déroute
Dans leur cours suspendu la mort brusque du Temps.
Et dans l’écroulement des nuages flottants,
Tel qu’un royal vieillard sur un trône d’ivoire,
L’éternel Justicier surgissait dans sa gloire.

Or, en ce même instant, les morts de toutes parts
S’éveillaient. Et voici que des charniers épars,
Des tertres inconnus, des tombes descellées,
Des souterrains secrets, des monts et des vallées,
Des funéraires puits et des caveaux murés
Où s’alignaient des corps dans la poix macérés,
Des cendres des bûchers, des profonds sarcophages,
Des flots insidieux, des sables des rivages,
La blême multitude émergeait à la fois.
Et bossuant le sol, disjoignant les parois
Sous le persévérant effort de leurs vertèbres,
Tous les morts apparus, oubliés ou célèbres,
Humbles ou grands, fuyant le vide des tombeaux,
De leurs anciennes chairs revêtaient les lambeaux
Et, tels qu’en leur humaine et propre ressemblance,
Du Trône de Lumière approchaient en silence.

Puis devant Dieu le Livre où tout est contenu,
Par lequel tout est dit, vu, révélé, connu,
Le Livre grand ouvert fut posé par un Ange.
Et tel qu’un vigneron en triant sa vendange
Loin du pressoir joyeux jette les grains pourris,
Le Seigneur prit le Livre et lut les noms écrits