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Et les astres éteints s’écroulaient par morceaux.
Prodigieux, ailés, tels que d’ardents oiseaux,
Dans le ciel déchiré fuyaient des météores,
Brusques avant-coureurs des nocturnes aurores
Dont le sang prophétique inondait l’Occident.

D’un bout du monde à l’autre allait se répondant
Le rauque hurlement des souffrances humaines.
C’était l’heure. Au sommet des collines Romaines,
L’ivresse impériale, au cœur de la Cité,
Sur tes autels déserts, Sainte Pudicité,
Dressait le trône d’or de la Prostituée.
Vorace et dédaignant une chair polluée,
La débauche, à la lèvre infâme, aux vils regards,
De vierges et d’enfants peuplait ses lupanars.
Et les tigres repus, dans les amphithéâtres,
Sur leurs ongles sanglants posant leurs crocs rougeâtres,
Parmi des corps broyés se couchaient pour dormir.

Les femmes, à genoux et lasses de gémir,
Berçaient des enfants morts sur leurs poitrines vides,
Sans qu’un pleur maternel brûlât leurs yeux livides.
Et les hommes, tremblant de peur, irrésolus,
Fermaient leurs cœurs séchés et ne nourrissaient plus
Que l’effroi d’être nés et la terreur de vivre,
Quand soudain, triomphant, formidable, énorme, ivre
De sang, gorgé de haine, armé du sceptre d’or,
Le Monstre à l’Orient sembla surgir encor.
Néron ressuscité, chef des Parthes féroces,