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Tu ne reverras plus, venant de Salamine,
Nos vaisseaux, aujourd’hui rompus, sans force, hélas !
Saluer au retour la Cité que domine
Le simulacre armé de la grande Pallas.

Les héros sont tombés ; tout meurt. Le sable jaune
A bu le sang pourpré des hommes au cœur fort.
Dans ta ville, Athéna ! les soldats d’Antigone
Sèment avec l’effroi la famine et la mort.

O Dieux inapaisés ! ô Kères vénérables !
Quel forfait déchaîna des vengeurs immortels
Sur le peuple d’Hellas, et de maux innombrables
Accable encor la terre où brillaient vos autels ?

Où sont les nobles jours, aimés des chastes Muses,
Et les chants cadencés des lyres aux beaux sons,
Et les Nymphes troublant de leurs courses confuses
Les bois noirs d’oliviers sur les bleus horizons ?

Quand Phidias donnait l’Acropole pour socle
Au peuple éblouissant de ses marbres pieux ;
Quand, tragiques rivaux, Eschyle avec Sophocle
Semblaient deux grands vieillards interrogeant les Dieux

Alors, ô Philémon, les strophes enflammées
D’un souffle de triomphe emplissaient tous les cœurs,
Tandis qu’en s’inclinant les saintes Renommées
D’une couronne d’or ceignaient les fronts vainqueurs !